17 Mai 1943 : terrible journée à Bacalan !

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Bacalan Story Page 38

Ce jour là 34 bombardiers américains « Liberator » de la VIIIème Air Force, sont partis d’Angleterre pour venir bombarder la base sous-marine et les bassins à flot. Volant à très basse altitude au dessus de l’atlantique pour déjouer les radars ennemis, ils reprennent de l’altitude (22000 pieds) à proximité de leur cible, et larguent 342 bombes en 7 minutes. Elles feront 195 morts et 272 blessés parmi les civils. De nombreuses maisons seront détruites. Les services municipaux estimaient à 2000 personnes le nombre de sinistrés.

79 ans plus tard, un enfant de l’époque témoigne :

Lorsque je vois les cohortes de fuyards apeurés en Ukraine, ça me remet en mémoire des souvenirs lointains et pourtant bien vivaces.

Résidant avec mes parents dans une petite rue appelée « Rue de Rouen » proche du Boulevard Alfred Daney et du Chemin de Labarde, il est une heure moins dix ce 17 mai. Je suis alors un gamin de 7 ans qui appelle sa mère pour lui montrer les avions qui brillent dans le ciel. Il faisait un magnifique soleil. Soudain à leur point de rencontre, c’est l’apocalypse, un bruit assourdissant, le feu la fumée, la poussière et une pluie d’objets divers. Le ciel qui s’obscurcit, le toit de la maison envolé, une énorme boule de terre sur la table du repas, le reste des plafonds qui reposent sur les fenêtres ouvertes. Je me souviens de ma mère m’entourant instinctivement telle la poule qui couve ses poussins.

Passé la stupeur c’est la fuite éperdue vers les marécages voisins, qui se situaient vers ce qui est aujourd’hui la descente du pont d’Aquitaine. En peu de temps, c’était des hordes de personnes hagardes, fuyant sur les digues, avec pour tout bagage ce qu’elles portaient sur le dos, pour échapper à l’enfer qu’elles venaient de connaitre.

Fortuite ou complice, la vigilance des occupants allemands avait été prise en défaut, car à priori aucune sirène d’alerte n‘était venue avertir du danger. C’était l’heure où les ouvriers étaient rentrés au domicile prendre le repas, les habitations étaient bien garnies et les victimes furent nombreuses. Ne parlait on pas après coup de 200 morts à Ravezies et de quelques dizaines à Bacalan ?

Les « gentils libérateurs » américains n’avaient cure des populations civiles, et si la base sous marine a été à peine écornée, les habitants abondamment « arrosés » ont payé un lourd tribut. C’est à la nature des sols très marécageux à l’époque, que je dois certainement d’être vivant, les bombes s’enfonçant profondément avant d’exploser, et les éclats ne remontant pas tous à la surface. Mon père parlait de 21 impacts de bombes dans un rayon d’environ 100 mètres autour de nous.

Si on comprend qu’à plus de 6000 mètres d’altitude, la base ne devait pas représenter grand-chose, était-ce suffisant pour justifier de la destruction de tout un quartier, tout comme le largage inconsidéré de bombes à des kilomètres après l’objectif, comme pour se délester afin de rentrer plus léger à la base, sans se soucier de qui les recevraient dessous?
Les guerres sont toujours ainsi pour les populations civiles.

Roger Rap

2 COMMENTAIRES

  1. Les reportages avec les moyens techniques actuels sur l’actualité brulante nous permet d’entrevoir ce qu’on vécut les Bacalanais.

  2. Très émouvant,merci de témoigner des ces instants terribles pour que les generations suivantes prennent conscience de ce que vous avez vécu.

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